Ce soir sur #France2 Soirée #Syrie et le documentaire « Un cri étouffé » de Manon Loizeau, Annick Cojean en collaboration avec Souad Wheidi.
Pourquoi faut-il voir ce film ?
D’abord parce qu’il fait le choix de laisser la parole à des femmes syriennes, des femmes engagées militantes et qui ont vu leur vie basculer dans la guerre mais aussi, à travers la mise en place d’un système de destruction massif à travers les viols systématiques dans les prisons de Bachar Al Assad.
Qu’il nous replonge dans ce qu’est exactement la guerre en Syrie, le départ avec les manifestations à Deera, celles de simples citoyens et qu’on a tous oublié malgré « opération César » de Garance Le Caisne livre poignant et tellement juste, malgré tous les articles, malgré tous les appels des syriens. Les médias, les politiques, les institutions nous ont submergé de Daech et de terrorisme au point d’avoir fait de Bachar El Assad un presque « sauveur » !
Parce qu’aussi et avant tout, c’est un film sur les femmes, et leur rôle essentiel souvent dans l’ombre, la manière dont elles nous regardent, nous, européens qui avons abandonné la Syrie comme il n’y a pas si longtemps nous avons abandonné la Bosnie; et elles nous le disent, sans colère, sans accusation, elles nous le disent simplement en nous regardant droit dans les yeux à la fin de ce film, droites , fières, justes et nous remettent à notre place avec tant de respect et de dignité.
Parce que Manon Loizeau a fait le choix d’aucun commentaire, le choix de ces voix magnifiques, tremblantes, et en colère parfois qui parlent , comme un flot, un torrent qui déferle sur nous. Parce que Manon a fait le choix de la poésie aussi, de la beauté, de la pudeur et de la dignité.
Ce film provoquera beaucoup d’émotion, mais il faut absolument que ce film provoque chez chacun de vous bien plus que cela, bien plus que cette émotion qui s’évanouira dans quelques jours, peut être même dès demain matin et ceci est normal, c’est même sain parce qu’il faut vivre et que pour cela il faut aussi se protéger d’une certaine manière de toutes ces horreurs. Pourtant il y a aussi des choses à faire, chacun et chacune d’entre nous ne sommes pas impuissants comme nous avons tendance à le croire trop souvent.
Il faut prendre conscience, être informé et comprendre.
Le film explicite et démontre parfaitement la mécanique, en place très rôdée et nous montre que rien n’arrive par hasard, que ces viols ne sont ni des pulsions de soldats ni des « dommages collatéraux », non: – ils sont pensés, – mis en place pour humilier, – enfermer dans le tabou et le silence, – détruire le système familial, – détruire les fils, les filles, les pères, les mères et les maris de ces femmes et, – rendre ces femmes prisonnières à jamais du crime abominable qu’on leur a imposé.
Comme vous le savez, nous travaillons depuis longtemps sur ces questions, en terme de sensibilisation publique nous travaillons avec les survivant e s parce que ce sont avant tout, des femmes, des hommes et des enfants d’une dignité absolue, d’une force incroyable et qu’il faut faire sortir de cette prison traumatique absolue en les regardant autrement, en ne détournant pas le regard ni les oreilles lorsque leurs mots disent l’indicible.
Le film à cet égard sait rester juste et pudique.
Il n’est nul besoin de formuler l’horreur pour la comprendre.
Nous travaillons au niveau judiciaire parce que des poursuites sont possibles, devant les juridictions pénales internationales comme dans le cadre des institutions judiciaires nationales respectives des pays concernés et à travers la compétence universelle.
Nous développons l’outil back up BACK UP Project – WWoW visant à répondre à la sécurisation, stockage et alerte concernant les viols de guerre partout dans le monde et permettant de préparer des dossiers judiciaires, de cartographier, d’apporter une assistance et de répondre aux besoins de la réalité du terrain.
Documenter pour que cesse la négation de l’existence de ce crime.
Nous développons le projet Foster a Survivor parce que la vie doit aussi exister et qu’il ne faut pas figer les survivant e s dans leur statut de victimes.
Parce que pour la Syrie, les blocages sont énormes puisque la Cour Pénale Internationale ne peut (encore) être saisie. Alors il est impérieux de faire pression sur les gouvernements européens, américains, russes et chinois pour que cela change, et pour que les femmes syriennes encore détenues dans les prisons sortent.
Nous sommes heureuses et heureux que de plus en plus de journalistes, documentaristes, rédaction, boites de production, chaînes de télévisions en France prennent le risque et parlent du viol de guerre. Les pays anglo saxons en ont fait un sujet important depuis bien longtemps, la France commence à emboiter ce pas, il faut continuer. Parce que c’est un sujet dont il faut parler pour avancer.
Parce que c’est un sujet pour lequel des solutions sont possibles et WWoW y travaille depuis longtemps déjà. Parce que non le viol de guerre n’est pas une fatalité.
Alors ce soir, ou demain en replay, prenez une heure et regardez un cri étouffé, même si c’est difficile, même si c’est bouleversant et essayez à votre manière de soutenir le travail pour l’élimination du viol de guerre. Ce peut être déjà juste en postant sur FB ce slogan de notre campagne lancée à Londres en 2014 auprès d’Angelina Jolie et dont j’ai fait le nom de mon ONG.
Pour ne jamais oublier que nulle part, une femme, un enfant ou un homme ne devrait être/devenir une arme de guerre.
Merci
Céline Bardet Fondatrice et Présidente de WWoW Juriste et enquêtrice Internationale spécialisée sur les crimes de guerre